20 avril 2011

Du Niveau de Productivité en Estonie

Estonie-Tallinn
Ce graph, tiré de The Economist est titré: "The productivity gap - Pay peanuts, work like monkeys"

S'il s'agit simplement d'un constat sans réelle analyse, le graphique comparant les niveaux de productivité des pays de l'est et de l'ouest est malheureusement extrêmement révélateur et montre que la fameuse "convergence" (les pays de l'est devant rattraper les pays développés de l'ouest) va encore prendre un certain temps. Sur le graphique, la productivité est fonction de la valeur (en euros) créée par heure travaillée et calculée sur le dernier trimestre 2010. Les résultats sont très intéressants.

Cocorico! Tout d'abord, on remarquera que malgré toute la mauvaise presse que l'on fait à la France sur les grèves, les 35 heures (où ça?)... nous conservons toujours un des meilleurs niveaux de productivité en Europe - et dans le monde.

Patriotisme mis à part, on observe que les pays de l'est ont des niveaux de productivité situés entre 5 et 10 euros (sauf Bulgarie, Roumanie) par heure travaillée alors que les pays de l'ouest (sauf Espagne, Italie) oscillent entre 35 et 45 euros.

Pourquoi un telle différence?

Les explications sont, je pense, multiples.
Si une bonne partie du transfert de compétences à été réalisée, il est évident que la partie la plus sensible reste dans les pays de l'ouest -certains pays ayant cependant développé leurs propres compétences (technologies de l'information en Estonie par exemple).

En termes d'infrastructures, le retard est abyssal. Un exemple révélateur, le transport. Cherchez une autoroute digne de ce nom en Estonie (une route sur laquelle il est possible de rouler à plus de 90km/h toute l'année), vous n'en trouverez pas. Une ligne de chemin de fer "rapide", inconnue au bataillon.
Des projets sont en cours mais l'autoroute reliant les deux principales villes du pays se fait encore et toujours attendre (j'en entends parler depuis 2005!). Pendant ce temps, il faut presque 3 heures pour faire les 188 km séparant les deux villes! Même histoire pour Tallinn-Riga: 311km, 4h30 de trajet! Et je ne vais pas non plus m'étaler sur la qualité des routes, totalement défoncées après les longs hivers. Mais comment font les Suédois, les Finlandais..?

Une autre différence important se situe au niveau culturel. Ayant travaillé en France et en Estonie à des postes assez similaires, la différence est flagrante! Seul en France pour effectuer mon travail de "webmarketeur", j'ai aujourd'hui une équipe de 3 personnes pour effectuer quasiment le même travail. Autant dire que la productivité est divisée par 4. Tiens, c'est exactement ce que l'on retrouve sur le graphique... intéressant.
Un exemple parmi d'autres, mais j'aurai aussi bien pu parler du temps de travail hebdomadaire - et notamment du temps effectif de travail: 35 heures en France ne valent pas 40 heures en Estonie.

Héritage du communisme? Philosophie du travail? Toujours est-il que l'impact sur la productivité est énorme!

Mais tout cela ne serait-il pas plutôt lié à la motivation? La motivation est un facteur qui va déterminer le niveau de productivité d'un employé mais il est également très complexe puisque chacun ne répondra pas de la même manière au même élément de motivation.

Toujours est-il que le niveau de rémunération est le facteur de motivation le plus important. Aussi remarque-t-on que les pays de l'est "pay peanuts" et "work like monkeys". Si l'augmentation de la rémunération ne doit pas être une réponse systématique, c'est bien entendu l'élément de motivation qui va avoir un impact direct sur la productivité d'un employé; et lorsque je vois des chefs d'entreprise qui prônent la baisse - ou le gel- des salaires pour faire augmenter le niveau de productivité, c'est simplement le résultat d'un calcul artificiel de leur part.
Ainsi, la valeur d'une unité de production créée en fonction du coût de cette unité sera meilleur mais le nombre d'unités créées à la fin de la journée sera probablement moindre et ne génèrera pas de croissance. Travailler sur la motivation de ses employés plutôt que de les frustrer a évidemment des effets bien plus intéressants.

Le travail doit devenir plus qu'un simple appareil de subsistance et le travail humain ne doit pas être dévalué. Voilà ce que les pays de l'est doivent encore découvrir.