Après la fête nationale du 24 Février, les drapeaux estoniens sont une nouvelle fois de sortie aujourd'hui, 14 Mars, pour célébrer la journée de la langue estonienne. Parlée par environ 1,1 million de personnes, dont 950 000 vivant en Estonie, l’estonien est une
langue de la branche fennique des langues finno-ougriennes. Ce groupe rassemble environ 40 langues parlées par plus de 20 millions de personnes dont les origines, il ya plusieurs milliers d’années, se situeraient dans le sud-est de l’Europe (autour des montagnes de l’Oural). Elle se rapproche du finnois et plus lointainement du hongrois (classé dans la branche ougrienne).
La branche fennique ou balto-finnoise regroupe les langues suivantes:
Le finnois (suomi) ainsi que ses dialectes comme le savo.Font également partie de ce groupe le kvène (parlé en Norvège) et le meänkieli (une variante de finnois parlé en Suède)
Le carélien classique parlé en Finlande et Russie (karjala) ainsi que ses variantes régionales le carélien d'Aunus et le lude (proche du vepse).
Le vepse, parlé par les Vepses (8000 habitants environ) habitant sur la rive ouest du lac Onega.
Le vote, est une langue uniquement orale en voie de disparition. Ils sont moins d'une trentaine de Votes à parler cette langue a l'ouest de Saint-Pétersbourg.
L'ingrien, parlé dans l'Oblast de Leningrad par moins de 800 personnes.
L'Estonien classique (eesti keel) et les langues sud-estoniennes telles le võro (võro kiil´ dans les régions de Tartu/Võru), le lutsi (lutsi maarahvas parlé au sud-est de la Lettonie proche de la ville de Ludza), le mulk (mulgi keel, parlé du cote de Viljandi/Valga), le seto (seto kiil´, parlé par le peuple Seto dans les régions de Põlvamaa et Võrumaa en Estonie et en Russie dans l'oblast de Pskov) et le tartu (tartu keel, qui comme son nom l'indique est pratique du cote de la ville de Tartu).
Le live ou livonien parlé en Lettonie dans la région de Courlande par moins de 40 individus.
Histoire de la langue estonienne
Dans sa Cosmographie datant du 8e siècle, le géographe latin Aethicus Ister mentionne une île à laquelle il attribue le nom de Taraconta. Il est possible que ce soit la première transcription d’un mot estonien. Taraconta pourrait être la traduction de Taarakond. Taara était l’un des principaux dieux des Anciens Estoniens alors que le suffixe kond désigne une communauté (comme dans famille, perekond, ou province, maakond). Taraconta pourrait désigner l’île de Saaremaa et Tara, leur dieu dont ils seraient les adorateurs.C’est plus probablement durant les croisades du 13e siècle, que les premières traces d’estonien écrit apparaissent. Arrivant sur ces rivages encore païens et largement méconnus, Henri le Letton décrit alors les croisades dans ses Chroniques de Livonie (Heinrici Chronicon Livoniae). Celles-ci contiennent des mots et des fragments de phrases en estonien.
L’ancienne Livonie devient alors le lieu d’établissement d’une noblesse et d’une bourgeoisie allemandes qui vont fortement influencer le vocabulaire estonien mais aussi sa syntaxe.
Le territoire qui correspond à l’Estonie actuelle passe ensuite dans les mains d’envahisseurs différents (danois, suédois, russes) auxquels la langue estonienne empruntera quelques mots de vocabulaire.
Mais c’est avant tout au 19e siècle durant le réveil national que l’estonien fleurit, notamment grâce à l’Université de Tartu. Du statut de langue de paysan, l’estonien devient langue de culture et commence à être utilisée dans la littérature et les sciences.
En 1884, Karl August Hermann fit paraître la première grammaire estonienne en estonien, qui contribua de façon importante à la standardisation de la langue.
Dans la deuxième moitié du 19e siècle, la population autochtone commença à se désigner sous le nom d’eestlane (Estonien), probablement emprunté deux siècles plus tôt au suédois ou à l’allemand. Auparavant, la majorité des Estoniens se désignaient sous le nom de maarahvas « les gens du pays » et appelaient leur langue maakeel « la langue du pays ».
Durant les premières décennies du 20e siècle, les intellectuels estoniens se donnèrent pour mission de développer leur langue pour l’adapter à la culture européenne moderne. Un rôle important dans ce processus fut joué par le linguiste (et professeur de français) Johannes Aavik, qui s’efforça d’enrichir et d’embellir la langue littéraire. Il utilisa abondamment les ressources fournies par le finnois et les dialectes, mais créa également des mots et des morphèmes grammaticaux artificiels. Le français inspira nombre de ses propositions.
Parallèlement à cette « rénovation linguistique » (keeleuuendus) lancée par Aavik, un autre courant, dirigé par Johannes Voldemar Veski, se concentra sur l’élaboration des normes et le développement de la terminologie. Plusieurs milliers de termes, dans tous les domaines du savoir et de la vie, furent créés pendant cette période. Au cours du 20e siècle, un rôle essentiel dans la fixation de la langue standard fut joué par les dictionnaires normatifs. Le premier d’entre eux parut en 1918.
Pendant le régime soviétique (1940-1991), la standardisation de la langue et le strict respect des normes devinrent une forme de résistance nationale. C’était une façon de s’opposer à l’idéologie soviétique, symbolisée par la langue russe. La langue était l’un des constituants fondamentaux de l’identité estonienne. Les autorités n’avaient d’ailleurs interdit ni l’étude scientifique de l’estonien ni son emploi dans la plupart des domaines de la vie publique (y compris l’éducation), ce qui permit aux Estoniens et à leur langue de résister à la russification et à la colonisation. Dans les années 1990, les attitudes à l’égard de la norme linguistique se sont assouplies. Les sociolectes et autres variétés linguistiques non standard sont revenus à l’honneur.
Lors de son adhésion à l’Union Européenne en Mai 2004, l’estonien devient une des langues officielles européennes.
Qui est Kristjan Jaak Peterson ?
Jour férié depuis 1999 (1996 selon certaines sources), le 14 mars marque l’anniversaire de Kristjan Jaak Peterson (1801–1822), considéré comme le fondateur de la littérature et de la poésie moderne estonienne.
Né à Riga le 14 Mars 1801, il y fait ses études au lycée entre 1815 et 1818 et se passionne pour la littérature classique. En 1819, il entre à l’université de Tartu pour étudier la théologie (son père est servant d’église) mais ne souhaite poursuivre dans cette voie. Il se dirige donc vers la philologie et la philosophie. En 1820 il abandonne ses études pour des raisons financières et rejette l’enseignement académique. Il retourne vivre à Riga pour mener une existence un peu marginale pendant deux ans où il donne des leçons particulières. Il s’achemine doucement vers la boisson et la maladie avant de mourir prématurément de la tuberculose à l’âge de 21 ans le 4 Août 1822.
Mais il part en laissant derrière lui quelques manuscrits qui ne seront publiés que cent ans après sa mort. Découverts au début du siècle dernier par les écrivains néo-romantiques de «Noor-Eesti » (Jeune-Estonie), et notamment son chef de file Gustav Suits. Ils le considèrent comme un précurseur génial annonçant la naissance de la littérature estonienne
Son œuvre littéraire se réduit à peu de choses : une vingtaine de poèmes en estonien, écrits pour la plupart pendant ses années de lycée, un journal intellectuel, premier exemple de prose philosophique estonienne, et trois poèmes en allemand, publiés en 1823 dans une revue de Leipzig et redécouverts en 1961.
Inconnu en son temps comme poète, Peterson exerça toutefois une influence sur la littérature estonienne par l’intermédiaire de sa traduction allemande de la Mythologia Fennica du Finlandais Christfried Ganander qui fut très lue en Estonie et aura une grande influence sur l'identité nationale estonienne et la littérature de la première décennie du 20e siècle.
Estimant que la mythologie finnoise devait permettre de reconstituer la mythologie estonienne, il ajouta en effet à l’ouvrage des développements personnels sur les dieux des Anciens Estoniens, posant ainsi les premières pierres d’une pseudo-mythologie que d’autres se chargèrent ensuite de compléter et qui joua un rôle important dans le développement de la culture estonienne (inspirant notamment Friedrich Reinhold Kreutzwald pour la rédaction de l’épopée nationale Kalevipoeg).
Sources :
litterature-estonienne.com
wikipedia